mercredi 7 novembre 2007

Etranges rêves...

Je fais d'étranges rêves au goût vénéneux et amer en ce moment. Ces jours derniers voici ce que j'ai rêvé. Par une belle journée ensoleillée, me semble-t-il, je me trouvais dans ma chambre d'enfant. Mais je n'arrive pas à savoir l'âge que je pouvais avoir. Il me semble que j'avais tous les âges à la fois, simultanément. Je me querellais avec une sorte de vieux satyre contre lequel je me débattais. Mais je n'arrive pas à savoir s'il était mâle ou femelle. Il me semble qu’il était à la fois l'un et l'autre. Soudain, j'eus l'impression que l'éclat du soleil ternissait, que la lumière s'estompait jusqu'à n'être qu'une luminosité de fin d'après-midi automnale ou hivernale. Pendant que le satyre criaillait et essayait semble-t-il de se défaire d'une grande et longue chemise qui ressemblait étrangement à une camisole de force dont il était vêtu, mon ouïe perçut un bruit étrange comme un clapotement qui fit se diriger mes yeux vers le couloir.
Je vis un peu d'eau qui avançait provenant du sous-sol, comme une marée étale. Je pensais aussitôt qu'il était inondé et je me déployais– j'avais alors mon âge adulte - pour sortir de la chambre et aller voir ce qui se passait par la fenêtre du séjour. Au fur et à mesure que j'avançais l'eau plate, calme et sombre montait silencieusement, inexorablement, rapidement. Pas un bruit. Tout était atone. Froid, mais de l'intérieur. Je ne ressentais pas la froidure, de l'extérieur. Pas un chant d'oiseaux. Pas un murmure. Pas une couleur. De l'incolore. De l'inodore. Comme une vie privée de sens. Arrivée dans le séjour, j'avais de l'eau déjà quasiment aux genoux mais je ne la sentais pas autour de mes jambes, pas plus que l'eau ne bougeait lorsque je me déplaçais. On aurait dit que je la fendais sans que sa surface en soit dérangée. L'eau montait toujours. En silence. Dehors, c'était une immense étendue liquide comme un lac gigantesque dont on ne voit pas les rives ou peut-être comme une mer si calme qu’elle est irréelle.
A la surface émergeaient encore des bouts de " choses" : hauts de maison, poteaux télégraphiques, troncs et futaies d'arbres, branches d'arbustes, couronnes de clôtures et de portails ; flottaient déjà des bouts de planches, des choses indistinctes que mon regard ne saisissait pas, tout absorbé par la montée feutrée de cette eau plate, lourde, épaisse comme de l'huile, glissante, insinuante, qui montait, montait, montait toujours. Simultanément je me disais qu'elle était montée à la vitesse de mon déplacement au ralenti, mais que, même lorsque je ne me déplaçais pas elle montait toujours. A un moment donné, alors que je regardais vers la table du séjour qui avait disparu, je sentis que cette eau traîtresse me ceinturait le ventre, et comme je m'étonnais à part moi qu'aucun objet léger ne flotte à l'intérieur, je réalisai à présent qu'elle m'entourait le torse mais qu'elle semblait s'être stabilisée au-dessous de ma poitrine. J'ai dû penser qu'il fallait absolument que je sorte de là, prête à partir par la porte-fenêtre et regardant où je pourrais aller pour me trouver au-dessus de la surface des eaux.
Une planche ne me portera pas, je n'ai pas de barque, je dois nager jusqu'aux grands arbres et grimper dans les plus hautes cimes, c'est mon seul salut, pensai-je. Mais à la fois je n'arrêtais pas non plus d'imaginer le pire : si l'eau recommence et continue à monter sans s'arrêter il n'y aura plus aucun point suffisamment haut aux alentours et je ne pourrai pas nager indéfiniment, mais je ferai la planche, toutefois je sentais bien que je ne pourrais pas flotter non plus éternellement… A ce moment-là, je me suis éveillée comme si je me redressais dans l'eau après avoir fait la planche justement. Le réveil était assez glauque et ce qui me paraissait étrange c'est que le rêve était tout entier sous mes yeux comme un vaste paysage de désolation froid et vide, comme si j'avais échappé in extremis à un engloutissement.

Années 80-90

Photographie de mhaleph

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